11 août : Discussions avec des emprunteurs

   Nous commençons par nous rendre à Campo, un petit village à 30km à l'ouest de Ibarretta où nous résidons. Nous y rencontrons Marguerita qui tient un petit magasin. Elle y vend boissons, sucreries ainsi que des journaux et des magazines qu'elle achète à Formosa. Nous sommes impressionnés par la propreté du magasin ainsi que par la diversité de ce qui y est vendu, deux caractéristiques peu communes des magasins de la région. Marguerita nous explique qu'elle a commencé par vendre quelques journaux, après avoir reçu de Bernadette un microcrédit qui lui a permis de s'acheter un présentoir. Depuis, à l'aide d'un renouvellement de son microcrédit et grâce aux bénéfices dégagés par ses ventes de journaux, elle a pu développer son affaire (changement de locaux, diversification de sa marchandise, …).  Bernadette nous explique que la réussite du projet de Marguerita, qu'elle présente comme un véritable exemple, est le fruit de beaucoup de sacrifices et de travail. Marguerita précise qu'elle travaille tous les jours, qu'il fasse beau ou qu'il pleuve. Nous sommes surpris car la culture du travail n'existe pas vraiment ici. Interrogée sur la possible jalousie des autres membres du groupe de microcrédit auquel elle appartient, Marguerita explique qu'elle préfère se voir comme un exemple et une source de motivation. 

Marguerita est fière de son magasin


   Irénée, également membre du groupe, a acheté, grâce au microcrédit,  des chèvres et des cochons (seuls les grands propriétaires possèdent des bœufs), vendus ensuite dans la boucherie de son mari. Cette activité lui a semblée plus viable dans la mesure où son projet initial – vente de draps – s’exposait à une trop grande concurrence locale. Nous assistons ensuite à la formation dispensée par la comptable sur le thème "Comment régulariser son activité ?", identique à celle que nous avons pu suivre la veille à Palo Santo, 

Fin de l'atelier comptabilité à Campo


   En début d'après-midi, nous nous rendons à Tigre, un tout petit village, 30km à l'ouest de Campo. Plusieurs nouvelles maisons fleurissent dans le village secoué par la tornade qui a frappé le village l’année dernière. Silvina, âgée d’une trentaine d’années et vivant avec ses deux filles et sa nièce nous reçoit autour d’un déjeuner local. Après cela débute la réunion du groupe de Tigre chez Anita, qui reçoit chaque fois le groupe, composé de 5 femmes, depuis bientôt 4 ans. Silvina démarre la rencontre en contant son expérience : elle s’est familiarisée avec le microcrédit autour de rassemblements paroissiaux, et elle a très rapidement été enthousiasmée par l’idée de pouvoir développer une économie solidaire, puisqu’elle est exclue de celle régie par « ceux qui ont de l’argent ». Afin de construire un projet viable, elle a commencé par assister aux réunions une année entière, puis a obtenu un premier microcrédit, lui permettant de préparer des mets locaux qu’elle revend ensuite. Aujourd’hui, parallèlement à son activité, elle s’est replongée dans des études de biologie pour devenir professeur. 







   Nous rencontrons ensuite Laëtitia, qui a utilisé le microcrédit pour s’acheter un freezer, qu’elle rembourse actuellement en vendant des empanadas et des pastillitas. A son tour, elle souligne une idée évoquée par plusieurs autres emprunteurs : le microcrédit lui a appris à devenir autonome, plus responsable, et à prendre des initiatives. Teresa, quant à elle a bénéficié de deux microcrédits consécutifs visant à lancer puis développer la boucherie qu’elle tient avec son fils. Ces microcrédits ont ainsi une utilité productive, puisqu’ils leur ont initialement permis d’acheter des bêtes, et commerciale puisqu’ils les revendent sous forme de plats préparés.  Sarah fait vivre cinq personnes grâce aux bénéfices qu’elle tire de sa petite activité de vente de confiseries tous les jours de 7h à 15h devant l’école de son quartier. Bernadette souligne que ce microcrédit lui a notamment permis de rendre son existence plus positive, assombrie suite au décès brutal de son jeune fils quelques années auparavant. Au cours de la discussion, nous interrogeons les emprunteuses sur les différences pouvant exister entre le microcrédit du réseau de Bernadette et de « Banquito » : dans cette dernière institution, les crédits devant être remboursés sur une période de 4 à 6 mois, bien souvent l’activité financée ne peut se développer assez vite pour rembourser les mensualités élevées. Pour Sarah, par exemple, ce crédit n’a été d’aucune utilité. 

Tigre est un des villages les plus pauvres de la région


   En fin de journée, nous allons visiter la coopérative de textile de Tigre, fruit d’un microcrédit atypique. Son lancement nécessitait le financement de son statut juridique (frais de dossier), sans lequel la coopérative ne pouvait démarrer sa production. Le réseau de Bernadette a donc accordé un microcrédit dans ce but, la coopérative ayant un fort potentiel de développement. En effet, de nouvelles couturières, après y avoir été formées, ont aujourd’hui rejoint la coopérative, qui développe de nombreux partenariats dans la région de Formosa. 

Discussion à la coopérative textile de Tigre

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire